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Les essentiels de la loi « Seniors, modernisations du dialogue social et transitions professionnelles »

Cabinet RYDGE Conseil

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Mise en ligne le 14/11/2025

8 min

Les essentiels de la loi « Seniors, modernisations du dialogue social et transitions professionnelles »

Publiée au Journal officiel du 25 octobre 2025, la loi dite « Seniors, dialogue social et transitions professionnelles » transpose en droit français plusieurs accords nationaux interprofessionnels (ANI) conclus entre 2024 et 2025. Ces accords, issus du « pacte de la vie au travail » lancé par le Gouvernement fin 2023, visent à améliorer l’emploi des seniors, renforcer le dialogue social et accompagner les transitions professionnelles tout au long de la carrière. Que faut-il en retenir ?

La loi concrétise la volonté des partenaires sociaux de sécuriser et de valoriser les parcours professionnels en articulant emploi, formation et protection sociale. Elle intègre notamment :

  • l’ANI du 14 novembre 2024 sur l’emploi des salariés expérimentés, destiné à favoriser l’embauche, le maintien et l’accompagnement des seniors ;
  • l’ANI du 14 novembre 2024 sur l’évolution du dialogue social qui renforce la négociation collective dans les entreprises et les branches ;
  • l’avenant au protocole sur l’assurance chômage, signé le 15 novembre 2024, adapté à l’allongement des carrières ;
  • l’ANI du 25 juin 2025 sur les transitions et reconversions professionnelles, visant à encourager la mobilité et la montée en compétences.

Ensemble, ces textes forment un socle de réformes pour moderniser la gestion des carrières et consolider le rôle des partenaires sociaux dans la définition des politiques de l’emploi.

 

Les nouveautés en matière de travail des seniors


Un nouveau CDI expérimental de « valorisation de l’expérience »

Pour lever des freins à l’embauche de salariés seniors, la loi met en place, à titre expérimental et pour 5 ans, un nouveau CDI de « valorisation de l’expérience ».

Pour y recourir, le salarié doit remplir l’ensemble des conditions suivantes :

  • avoir au moins 60 ans (ou entre 57 et 60 ans, si une convention ou un accord de branche étendu le permet) ;
  • être inscrit en qualité de demandeur d’emploi auprès de France travail ;
  • ne pas percevoir de retraite à taux plein (sauf en cas de survivance d’un régime spécial de retraite) ;
  • ne pas avoir travaillé pour l’entreprise ou le groupe dans les 6 mois précédant la conclusion du contrat.

Au moment de la signature du contrat de valorisation de l’expérience, le salarié doit remettre à son employeur un document fourni par l’assurance retraite, indiquant la date à laquelle il pourra bénéficier d’une retraite à taux plein.

Dans le cadre de ce contrat, l’employeur bénéficie de plusieurs avantages :

  • un régime dérogatoire de mise à la retraite : il peut mettre à la retraite d’office le salarié dès que celui-ci atteint l’âge légal de départ à la retraite ou celui du taux plein automatique. Il n'est, donc, pas nécessaire de recueillir l'accord préalable du salarié. L’entreprise doit, toutefois, respecter le préavis prévu en cas de licenciement et verser une indemnité au moins équivalente à celle d’un licenciement.
  • d’une exonération de la contribution patronale de 30 % habituellement due sur l’indemnité de mise à la retraite.

Retraite progressive : l’obligation de justification du refus de l’employeur est renforcée


Depuis le 1er septembre 2023, un employeur qui refuse le passage à temps partiel (ou temps réduit, si forfait jours) dans le cadre d’une demande de retraite progressive doit expliquer son refus en démontrant que la durée de travail demandée est incompatible avec l’activité économique de l’entreprise.

Désormais, la loi « Seniors » va plus loin : elle impose à l’employeur de justifier son refus de manière plus détaillée. L’employeur qui refuse la demande devra démontrer en quoi la réduction d’activité du salarié pourrait menacer la continuité de l’activité ou du fonctionnement de l’entreprise.

L’employeur pourra, également, justifier de ce refus, en faisant état de difficultés de recrutement ou de l’état du poste en tension occupé par le salarié, qui pourraient faire obstacle à la réduction de son temps de travail.

Ce renforcement de la justification du refus de l’employeur intervient alors même que l’âge d’éligibilité du dispositif de retraite progressive, provenant lui aussi de l’ANI portant sur l’emploi des salariés expérimentés, avait déjà été abaissé à 60 ans et ce pour toutes les pensions de retraite prenant effet à partir du 1ᵉʳ septembre 2025.

Temps partiel de fin de carrière et indemnité de départ à la retraite


Afin de faciliter l’aménagement de la fin de carrière et de lever les freins à l’embauche des salariés expérimentés, la loi prévoit désormais la possibilité de financer le temps partiel de fin de carrière avec l’indemnité de départ à la retraite du salarié.

Depuis le 26 octobre 2025, il est désormais possible d’affecter tout ou partie de cette indemnité au maintien de la rémunération du salarié en fin de carrière, alors que celui-ci passe à temps partiel (ou à temps réduit).

Cette indemnité serait alors fractionnée pour être versée de façon anticipée chaque mois et, ainsi, pallier la perte de revenu. Lors de son départ définitif à la retraite, l’employeur devra verser le reliquat de cette indemnité au salarié.

Cette possibilité est conditionnée par l’existence de dispositions conventionnelles (accord collectif d’entreprise ou, à défaut, accord de branche) le prévoyant et l’impossibilité de cumul de ce financement avec le dispositif de retraite progressive.

Les nouveautés en matière de dialogue social

 Nouvelle obligation de négociation sur l’emploi des seniors

Un nouveau thème de négociation obligatoire est instauré dans les entreprises et groupes comptant plus de 300 salariés et vise les conditions d’emploi, de travail et d’amélioration des conditions de travail des salariés expérimentés « en raison de leur âge ».

Par principe, cette négociation obligatoire devra se tenir tous les 3 ans dans ces entreprises. Toutefois, un accord de méthode pourra prévoir une périodicité différente, sans pouvoir excéder une durée de 4 ans.

À cette occasion, il sera demandé aux partenaires sociaux d’aborder les conditions d’emploi, de travail et d’amélioration des conditions de travail des salariés expérimentés « en considération de leur âge », sans que la loi ne donne, toutefois, de définition précise.

Les thèmes obligatoires incluront :

  • le recrutement des seniors ;
  • leur maintien en emploi ;
  • l’aménagement des fins de carrière ;
  • la transmission des compétences.

Du fait de cette réforme, l’emploi des salariés âgés, la transmission des savoirs et des compétences et l’amélioration des conditions de travail des salariés âgés ne font plus partie des thèmes facultatifs de la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (ou « GEPP »).

 Mandats CSE : suppression de la limite maximale de mandats successifs

Jusqu’alors, dans les entreprises employant au moins 50 salariés, un élu du CSE ne pouvait exercer plus de 3 mandats successifs, sauf si le protocole d’accord préélectoral prévoyait la possibilité de lever cette limite.

Désormais, cette limitation a été supprimée pour toutes les entreprises, quel que soit leur effectif. En d’autres termes, les élus du CSE peuvent désormais se présenter à chaque nouveau cycle électoral, sans qu’aucune limitation du nombre de mandats successifs ne fasse obstacle à leur candidature.

Par conséquent, la désignation supplétive de délégués syndicaux par une organisation syndicale représentative, jusqu’alors réservée aux seuls anciens élus ne pouvant plus se présenter du fait de la limitation des mandats successifs, est désormais ouverte à tous les anciens élus.

Rappelons que cette désignation supplétive intervient lorsqu’aucun candidat au mandat de délégué syndical ne remplit les conditions requises ou ne se porte volontaire.

Les nouveautés en matière de formations et de transitions professionnelles

L’entretien de « parcours professionnel » remplace l’entretien professionnel

Organisé dès la 1ʳᵉ année suivant l’embauche du salarié dans l’entreprise, puis tous les 4 ans, il pourra être adapté à la période et au contenu renégociés par accord collectif, sans dépasser cette périodicité.

Cet entretien vise à aborder avec les salariés les compétences, les qualifications, les besoins de formation, les évolutions professionnelles et les mobilisations possibles du compte personnel de formation, de la validation des acquis de l’expérience ou du bilan de compétences.

Notez que des entretiens spécifiques sont prévus à mi-carrière (45ᵉ anniversaire du salarié) et avant 60 ans pour anticiper le maintien dans l’emploi et la fin de carrière.

Un entretien d’état des lieux, au contenu approfondi, aura également lieu tous les 8 ans (ou dès la 7ᵉ année pour le « nouveau » salarié), afin de vérifier les formations suivies et les évolutions professionnelles du salarié.

Comme antérieurement, cet entretien devra être proposé à l’issue de certains congés (congé maternité, congé paternité, congé parental ou congé adoption notamment) ou d’absence du salarié dans l’entreprise liée à une période d’activité à temps partiel du salarié (un arrêt longue durée ou un mandat syndical, par exemple).

L’entrée en vigueur des nouvelles dispositions relatives aux entretiens professionnels diffère selon la situation de l’entreprise :

  • entreprises avec un accord collectif d’entreprise ou de branche en cours de validité : les règles issues de la loi s’appliqueront à compter du 1er octobre 2026 aux accords existants ;
  • entreprises sans accord collectif d’entreprise ou de branche : les dispositions légales s’appliquent dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, soit le 26 octobre 2025.

Cette disposition permet de garantir une transition progressive pour les entreprises déjà engagées dans un accord collectif.

La période de reconversion : nouveau dispositif

Cette nouvelle « période de reconversion », résultant de la fusion des dispositifs « Pro-A » et « Transitions collectives », permettrait à l’employeur, selon les cas :

  • de recruter des salariés d’autres entreprises pour les former à occuper un emploi pour lequel ils ne disposent pas encore des embauches et des qualifications requises ;
  • d’accompagner la reconversion ou la promotion interne des salariés, en s’adaptant aux évolutions des métiers de l’entreprise ;
  • d’accompagner la reconversion externe des salariés dans le cadre d’un projet professionnel.

Concrètement, ce dispositif est ouvert à tout salarié, quels que soient son âge, son niveau de qualification et sa situation professionnelle initiale, et ouvre droit à l’obtention d’une certification.

Durant toute la période de reconversion, le salarié bénéficie d’actions de formations réalisées dans l’entreprise (« en interne ») ou ailleurs (« en externe ») qui seront comprises entre 150 et 450 heures réparties sur 12 mois maximum.

Notez qu’un accord collectif pourra augmenter cette durée, sans pouvoir dépasser 1 000 heures de formation réparties sur 36 mois.

  • Dans le cadre d’une période de reconversion en interne, c’est-à-dire au sein de l’entreprise, le salarié conserve son contrat de travail et la rémunération qui y est associée. Les modalités de mise en œuvre de cette période devront, toutefois, faire l’objet d’un accord écrit.
  • En revanche, lorsque la période de reconversion a lieu en dehors de l’entreprise (« période de reconversion externe »), le contrat de travail du salarié est suspendu dans son entreprise initiale. Les modalités de cette suspension devront faire l’objet d’un accord écrit régissant notamment la durée de cette suspension et les modalités d’un éventuel retour anticipé du salarié au sein de l’entreprise.

La formation pourra être financée par le compte personnel de formation (CPF) du salarié avec son accord. En cas de période de reconversion en interne, le CPF ne pourra être mobilisé que dans la limite de 50 % des droits inscrits sur le compte.

Pour la période de reconversion en externe, il n’y aura pas de limite, laissant le choix au salarié de mobiliser tout ou partie des droits acquis de son CPF pour financer sa période de reconversion.

Les nouveautés en matière d’Assurance chômage

Les nouveautés du bonus-malus

À compter du 1ᵉʳ mars 2026, qui marquera le début d’une nouvelle période de modulation, et sous réserve de la publication d’un arrêté non encore paru à ce jour, le taux de séparation ne tiendra plus compte :

  • du licenciement pour inaptitude d’origine non professionnelle ;
  • du licenciement pour faute grave ou faute lourde.

Ainsi, ces modes de rupture des contrats de travail ne seront plus pris en compte pour moduler le taux de cotisation d’Assurance chômage due.

Les nouveautés des « primo-entrants » à l’Assurance chômage

Les primo-entrants à l’Assurance chômage désignent les demandeurs d’emploi qui n’ont pas bénéficié de l’allocation de retour à l’emploi au cours des 20 ans qui précèdent leur demande.

Pour ces primo-entrants, le bénéfice des allocations sera subordonné à une durée d’affiliation à l’Assurance chômage de 5 mois. Rappelons que cette durée d’affiliation est en principe de 6 mois pour tous les demandeurs d’emploi.

Notez que cette durée d’affiliation de 5 mois doit être comprise sur une période de référence :

  • de 24 mois pour les salariés âgés de moins de 55 ans à la date de fin de leur contrat de travail ;
  • de 36 mois, à compter de cette même date pour les autres salariés.

Ici encore, un arrêté non encore paru à ce jour devra agréer cette nouveauté, désormais transposée dans le Code du travail et qui entrera en vigueur à cette occasion.

Entrée en vigueur

La loi « Seniors », portant sur la transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et relative à l’évolution du dialogue social, entre en vigueur au lendemain de sa publication au Journal officiel, soit le 26 octobre 2025.

Néanmoins, certaines de ses dispositions feront l’objet d’une entrée en vigueur différée.

Sources : 

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